La place du cardio dans les sports

Ayant participé depuis un jeune âge à la pratique du football, j’ai souvent entendu des entraîneurs dire aux joueurs de faire du jogging sur de longues distances afin de développer leur système cardiovasculaire pendant la saison morte. Toutefois, pour les sports de force-vitesse comme le football, le hockey, le basketball et le soccer, entre autres, cette pratique peut présenter plus de désavantages que de bénéfices à court et à long terme. Voyons pourquoi.
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A priori, lorsque le corps humain accomplit un travail physique, celui-ci tire son énergie de trois filières énergétiques : le système phosphagène, le système glycolytique et le système oxydatif. Ces trois systèmes fonctionnent de manière simultanée lors de tout exercice, mais la prédominance de la contribution d’un système par rapport à un autre dépend, avant tout, de l’intensité et de la durée de l’exercice en cours. La première filière énergétique, le système phosphagène, utilise l’adénosine triphosphate (ATP) et la créatine phosphate (CP) comme sources principales d’énergie. Ces sources d’énergie sont limitées dans le corps, mais sont les premières utilisées dans les exercices de courte durée (1-10s) et de haute intensité (90-100%), comme un sprint en athlétisme ou un épaulé-jeté en haltérophilie. Quant au système glycolytique, il utilise principalement les glucides comme source d’énergie. Le produit final de la glycolyse, qui est le processus de dégradation des glucides provenant du glycogène musculaire ou du glucose sanguin afin de reformer l’ATP, est le pyruvate. Le pyruvate peut être converti en lactate pour la resynthèse de l’ATP si l’effort est d’assez haute intensité ou être transporté dans la mitochondrie, s’il y a présence suffisante d’oxygène, afin d’entrer dans le cycle de Krebs. Finalement, le système oxydatif tire son énergie des gras, la plus grande réserve d’énergie du corps. Toutefois, la conversion des triglycérides en ATP via la bêta-oxydation est un long processus.
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Une fois que l’on est plus familier avec la physiologie du corps humain en ce qui a trait aux différentes filières énergétiques, on peut commencer à questionner la prescription de faire de la course à faible intensité sur une longue distance pour les sports d’équipe. Ce type de prescription ne correspond pas aux exigences de sports mentionnés plus haut. Ces sports consistent majoritairement en des efforts courts, de haute intensité et qui sont répétés lors d’une séquence de jeu. Conséquemment, le système phosphagène est le premier à entrer en action, avec une contribution allant de modeste à importante du système glycolytique si l’activité se prolonge.
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Alors pourquoi prescrire un entraînement qui cible le système oxydatif quand celui-ci n’est que très peu utilisé dans la pratique sportive? Souvent, un individu reproduit ce qui a été fait auparavant sans se questionner sur la pertinence et l’impact que cette pratique peut avoir sur les athlètes. Quand l’on prescrit un entraînement de faible intensité réalisé sur une longue période de temps, le corps s’adapte au stimulus d’entraînement qui lui est présenté. Chez l’être humain, les fibres musculaires de type IIx perdront leur capacité à déployer de la puissance musculaire. Ces fibres musculaires entreront dans un processus de conversion vers les fibres de type I; peu puissantes, hautement résistantes à la fatigue et adaptées au système oxydatif. Chez l’athlète de force-vitesse, cette transition aura un impact négatif sur ces performances sur le terrain. De plus, la transition inverse de la fibre de type I vers la fibre de type IIx est très faible.
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Pour éviter que cette situation ne se produise, il est important de cibler les filières énergétiques propres à chaque sport et de les entraîner. Il existe de nombreuses prescriptions d’entraînement pour travailler les différents systèmes. De manière concrète, plus la durée d’un exercice est courte et son intensité élevée, plus il est important d’accorder une longue période de repos afin de s’assurer de la resynthèse de l’ATP (3-5 minutes) et de la créatine phosphate (5-8 minutes). Les temps de repos présentés ci-haut sont plus adaptés à l’entraînement du sprint en athlétisme. Lorsque l’on pratique des sports d’équipe, la période de repos est souvent plus courte et donc, incomplète. L’entraînement par intervalles devient alors pertinent pour ces athlètes. Ce type d’entraînement consiste en la réalisation de sprints de courte durée (5-10s) et de haute intensité (90-100%), combinés à un temps de repos entre 12-20 fois le temps d’effort pour solliciter le système phosphagène. Pour solliciter le système glycolytique, un temps d’effort de 15-30 secondes à 75-90% d’intensité combiné à un temps de repos de 3-5 fois le temps d’effort peut être utilisé. L’entraînement en intervalles permettra alors aux athlètes de développer leur puissance aérobie tout en améliorant leur capacité à récupérer rapidement entre deux efforts. L’entraînement aérobie peut être utilisé comme outil de récupération, quoi qu’il ne représente pas nécessairement le moyen le plus efficace. Un entraînement par intervalles peut remplir le même mandat.
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En conclusion, il est important de prioriser l’entraînement des filières énergétiques en considérant leur contribution respective dans les sports pratiqués. Un sport sollicitant la puissance anaérobie alactique doit être entraîné de manière à solliciter des adaptations propres à cette filière et non en sollicitant le système oxydatif. Le message important à retenir est de contextualiser l’entraînement des filières énergétiques selon le sport afin d’obtenir un transfert significatif de l’entraînement vers la performance sportive. Ne soyez pas l’entraîneur qui reprend les erreurs des autres, mais plutôt celui qui est à l’affût des dernières recommandations en entraînement et qui planifie ses séances de manière logique et sensée.

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