Depuis la fin de ma carrière en tant que joueur de football américain, je m’intéresse davantage à des sports qui m’étaient plus ou moins inconnus il y a de cela quelques années à peine.
Il y a quelques mois, ma voisine m’a fait rencontrer un entraîneur de soccer du Royaume-Uni vivant maintenant au Québec et nous entretenons depuis une excellente relation avec l’athlète comme centre d’intérêt. J’ai eu la chance d’échanger et même d’entraîner quelques joueurs à l’école secondaire où il enseignait l’année dernière. Depuis, il a obtenu un poste d’éducateur physique et d’entraîneur du programme de concentration en soccer dans une autre école secondaire. Grâce à cela, j’ai maintenant la chance d’intervenir plus régulièrement auprès de ces jeunes, puisque cet entraîneur me demande souvent d’encadrer les différentes équipes qu’il dirige. Il s’agit pour moi de mon premier contact avec le sport du soccer et des jeunes étudiants-athlètes de ce niveau et l’expérience est très enrichissante. Examinons donc ensemble la préparation physique en soccer dans le cadre d’un programme de concentration soccer au niveau secondaire.
Contexte
J’ai réalisé mes premières séances d’entraînement avec les jeunes au retour des vacances des Fêtes. J’ai mis en place les séances d’échauffement, quelques exercices de pliométrie et de renforcement musculaire globaux. Notre but était davantage d’apprendre à connaître les jeunes et obtenir le pouls du groupe lors de ces séances. J’aimerais bien effectuer une évaluation plus complète des jeunes (tests PCA généraux et quelques tests de performance en course), mais nous avons pris la décision d’attendre au début de la prochaine année scolaire afin de pouvoir établir des mesures de référence et refaire ces mêmes tests à quelques occasions au cours de la prochaine année scolaire. Néanmoins, j’ai été en mesure de décerner certains points faibles qui devront être travailler à l’avenir.
En termes de population et d’équipements disponibles, il s’agit de jeunes de première, deuxième et troisième secondaire. Au total, environ 60 jeunes de différents niveaux d’habiletés. Le programme possède un équipement très limité en termes de préparation physique. On parle de quelques haies de pliométrie, cerceaux d’agilité, quelques échelles de footing et des cônes. L’école secondaire possède une salle de musculation avec de l’équipement de base, mais qui ne permet pas de travailler de manière idéale avec de tels groupes. J’ai accès à quelques ballons médicinaux et aux banc suédois du gymnase. Il faut donc utiliser tout ce matériel et son imagination afin de bâtir les contenus d’entraînement.
Observations
Depuis que je travaille à cette école, j’ai pu observer de nombreux entraînements en soccer en plus d’intégrer un travail de base en musculation/préparation physique. Il s’agit davantage d’une introduction à la préparation physique, mais cela m’a néanmoins permis de relever quelques constats:
- Il y a une grande différence au niveau de la coordination chez les jeunes, autant entre les différents niveaux de scolarité qu’entre les garçons et les filles. S’agit-il là d’une question de développement moteur? D’une question d’exposition à d’autres sports ou simplement d’une exposition antérieure aux exercices tels que les skips?
- On remarque une incapacité/difficulté à contrôler le fémur lors de mouvements comme le squat à une jambe ou la fente avant. Cela provoque le «valgus collapse» qui expose ainsi le genou à des blessures au ligament croisé antérieur. Cela se remarque beaucoup plus chez les jeunes filles.
- Faible capacité de maintenir un gainage abdominal, autant au niveau de la posture (efficacité) que de la durée (uniformité dans le temps). Cela autant au niveau ventral que latéral. Au niveau dorsal, ceux-ci sont incapable d’atteindre une extension de la hanche qui permet au corps d’être en ligne droite.
Suite à ces observations, il est de mon travail de permettre à ces jeunes de s’améliorer sur les différents aspects mentionnés ci-haut. Avant tout et surtout avant de parler performance sur le terrain, il est primordial d’établir les fondations sur lesquelles nous allons bâtir un athlète plus résistant et ainsi plus performant.
Le plan de match
L’approche à privilégier est fort simple: établir les fondations en termes de mouvement avant de penser à cibler les qualités physiques liées plus spécifiquement à la performance en soccer. De toute façon, en travaillant sur les fondamentaux de l’entraînement comme le contrôle moteur, la posture, le biomécanique des exercices et la capacité à déplacer le poids de son corps, nous observerons forcément une augmentation de la performance.
Comment intégrer tous ces points à améliorer dans le contexte d’un programme de concentration soccer chez des jeunes du secondaire? Une excellent moyen est d’optimiser l’échauffement afin d’incorporer plusieurs exercices qui sollicitent les points mentionnés précédemment. Pour travailler la coordination par exemple, j’utilise une variété de skips (High skips ou «cherry picking», le Power skip, le A-skip vers l’avant, mais aussi vers l’arrière et le côté, le butt-kick, etc.). Pendant que les jeunes réalisent, je les laisse faire. Une fois la répétition complétée, je leur donne du feedback sur leur positionnement (coude à 90°, mouvement du bras à l’épaule et non au coude), mais aussi sur le but à atteindre. Par exemple, pour le High skip, ceux-ci doivent aller chercher le plus de hauteur possible. Pour le Power skip, il s’agit d’amener la jambe en flexion à la hanche le plus rapidement possible vers le sol pour se propulser vers le haut.
Plus tard dans l’échauffement, rien ne nous empêche de réaliser quelques exercices musculaires avec le poids du corps. Incorporer le squat avec le poids du corps est un magnifique moyen de travailler le contrôle moteur des membres inférieurs, de travailler la posture de manière dynamique pendant l’exercice et de renforcer le concept de triple flexion et d’absorption de la force. On peut également augmenter le niveau de difficulté en manipulant le tempo, le type de contraction musculaire, la profondeur ou en optant pour une variante comme le squat à une jambe par exemple. Cela nous permet également de discerner quelconques limitations chez le jeune athlète en question.
Par la suite, pour les séances d’entraînement, j’aime bien établir un thème pour les séances d’entraînement. Par exemple, une séance pourrait cibler principalement les qualités d’absorption/réduction de la force grâce à des exercices comme le squat, la fente avant ou sur place, le squat sur une jambe, etc. Une autre pourrait avoir comme objectif le renforcement de la posture pour l’accélération par exemple. Chaque séance aurait un objectif précis et permettrait ainsi de choisir des exercices et des progressions/régressions en fonction des participants.
Dans le contexte actuel, il n’est pas nécessaire de regarder à optimiser la performance sportive, mais bien d’établir la base en termes de mouvement sur laquelle nous pourrons ensuite travailler pour augmenter la capacité de performance spécifique au sport du soccer. Toutefois, pour ces jeunes, l’accent doit être mis sur l’apprentissage des mouvements fondamentaux, l’exécution de ces mouvements dans une forme impeccable pour ensuite pouvoir penser à améliorer leurs actions sur le terrain. Cette approche leur sera plus bénéfique que de bâtir des qualités de performance qui sont à risque de causer des blessures à moyen et long terme à cause de fondations inadéquates. Le jeune athlète, en ce sens, est un peu comme une grande pyramide dont le pic sera atteint après plusieurs années de travail et de peaufinement.