L’entrainement des femmes et des hommes doit-il être différent?

Il s’agit là d’une question importante en préparation physique, car l’entrainement, en plus d’être spécifique aux exigences du sport, doit prendre en considération les caractéristiques physiques de l’athlète. Or, il existe évidemment des différences entre les femmes et les hommes, autant physiques que psychologiques, auxquelles nous devons porter une attention particulière. Dans ce court article, nous nous attarderons notamment sur deux considérations physiologiques à prendre en considération lors de la mise sur pied d’un programme d’entrainement pour une femme.

Sur le plan physique, une des grandes différences entre les femmes et les hommes est ce fameux angle Q. Les femmes, à cause de leur bassin, possèdent un angle Q qui est davantage prononcé comparativement aux hommes (15±5 degrés vs 8-10 degrés respectivement, Hébert & Marquis, 2010). Cette réalité les prédispose à un plus grand stress au niveau du genou et plus particulièrement au niveau du ligament croisé antérieur (LCA), dont une des fonctions est de limiter la translation antérieure du tibia. Or, lors d’activités avec une haute demande de décélération (réception de saut, changement de direction), on observe souvent chez les femmes un mouvement du genou vers l’intérieur qui est combiné avec une rotation du fémur, exposant ainsi le LCA à des risques de blessures plus élevés. Pour tenter de diminuer le haut taux de blessures au LCA observé chez les femmes depuis plusieurs années, plusieurs stratégies ont été proposées : entrainement neuromusculaire, pliométrie avec accent sur la réception des sauts, renforcement des muscles ischio-jambiers, etc.

Une autre considération a trait aux compressions verticales sur la colonne lombaire chez la femme. C’est en lisant un article sur l’analyse de la charge sur l’articulation du genou et sur la colonne vertébrale que j’ai pu faire le lien avec un énoncé de Vern Gambetta lors du dernier programme de mentorat GAIN qui mentionnait, avec de recul à propos de son expérience de terrain, l’importance de limiter l’utilisation du squat arrière avec les athlètes féminins. Dans un article de Hartmann, Wirth, & Klusemann (2013), les auteurs en question s’interrogent sur l’utilisation du quart de squat et du demi squat avec des charges supra-maximales dans une optique de performance. Ceux-ci font référence notamment à deux articles (Ebbesen, Thomsen, Beck-Nielsen, Nepper-Rasmussen, & Mosekilde, 1999; Gilsanz et al., 1994) qui démontrent que les femmes possèdent des corps vertébraux qui peuvent absorber moins de force en compression ainsi que des « lower end-plate » moins volumineuses, exposant ainsi leur colonne vertébrale à plus de stress axial pour une même charge comparativement à un homme.

À cet égard, ne serait-il pas plus prudent d’utiliser des exercices unilatéraux comme la fente, le step-up et le squat unilatéral à l’entrainement? Le squat bilatéral est un mouvement fondamental à maitriser certes, mais il est toutefois possible d’utiliser diverses variations et équipements pour solliciter ce mouvement. Un squat avant avec pleine amplitude de mouvement par exemple, lorsqu’exécuté en contrôle et avec des répétitions de qualité, peut s’avérer une alternative intéressante d’autant plus que la charge utilisée sera moindre. La manipulation des différentes variables (répétitions, intensité, vitesse/tempo, amplitude, repos, temps sous tension) sera également un atout important pour le préparateur physique.

Au final, je ne dis pas que l’entrainement d’une femme doit être complètement différent de celui d’un homme. Au contraire, nous devons y retrouvons beaucoup plus de similarités que de différences. Toutefois, il est important de considérer non seulement les différences physiologiques, mais également les différences psychologiques et sociales qui différencient les deux sexes afin que ceux-ci puissent obtenir des résultats optimaux.

Références

Ebbesen, E. N., Thomsen, J. S., Beck-Nielsen, H., Nepper-Rasmussen, H. J., & Mosekilde, L. (1999). Age- and gender-related differences in vertebral bone mass, density, and strength. Journal of Bone and Mineral Research, 14(8), 1394–1403. doi:10.1359/jbmr.1999.14.8.1394

Gilsanz, V., Boechat, M. I., Gilsanz, R., Loro, M. L., Roe, T. F., & Goodman, W. G. (1994). Gender differences in vertebral sizes in adults : Biomechanical implications. Radiology, 190, 678–682.

Hartmann, H., Wirth, K., & Klusemann, M. (2013). Analysis of the load on the knee joint and vertebral column with changes in squatting depth and weight load. Sports Medicine, 43, 993–1008. doi:10.1007/s40279-013-0073-6

Hébert, M., & Marquis, D. F. (2010). Pathologies patello-fémorales. Hôpital de Québec.

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