Musculation traditionnelle (dynamophilie) et ses variantes versus l’haltérophilie

Dernièrement, j’ai lu un article sur le site web EliteFTS qui a rallumé un débat qui fait rage depuis des années: Quelle philosophie d’entraînement, la dynamophilie (Powerlifting) ou l’haltérophilie, est la meilleure en terme de résultats obtenus dans la préparation sportive?  Les dynamophiles vous diront que leur manière de s’entraîner est mieux pour telle et telle raison, tandis que les haltérophiles feront de même.  Or, il y a lieu de se poser la question, puisque tant d’entraîneurs utilisent l’une ou l’autre de ces philosophies d’entraînement quand vient le temps d’entraîner les athlètes de sports de force-vitesse.  N’étant ni un dynamophile ni un haltérophile, j’ai néanmoins expérimenté divers programmes d’entraînement qui ont utilisé l’une ou l’autre de ces philosophies.  Je tenterai ici de vous faire part de mon expérience et de pourquoi je favorise l’une par rapport à l’autre, mais pas au détriment de lui réserver l’exclusivité dans mes programmes d’entraînement.
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A priori, il est convenable de définir ce qu’est la dynamophilie et l’haltérophilie.  Les deux philosophies d’entraînement sont, en fait, deux sports à part entière.  La dynamophilie ou powerlifting, consiste à lever la charge la plus lourde possible lors de l’exécution de trois mouvements, soit le squat, le deadlift et le bench press.  L’amplitude de mouvement est souvent réduite à son minimum dans le but de soulever des charges plus lourdes.  De plus, les dynamophiles peuvent compétitionner «geared» ou «raw», c’est-à-dire avec ou sans combinaison spécialisée.  Dans les dernières années, on a pu assister à des soulevés de terre de plus de 800 livres, des squats à plus de 1150 livres et des développés couchés à plus de 900 livres (chiffres à titre indicatifs, certains records sont plus élevés!). 
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Pour sa part, l’haltérophilie est un sport olympique, qui consiste à soulever la plus grande charge possible sur l’épaulé-jeté et l’arraché.  Ces deux mouvements, très techniques, requièrent puissance musculaire, vitesse, souplesse, coordination et équilibre.  Les charges soulevées pour chaque mouvement varient entre 200 et 600 livres, selon la catégorie de poids et le sexe des athlètes.
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Étant donné que ce sont deux sports à part entière, il est peu convenable d’entraîner un athlète de sport d’équipe de la même manière qu’un dynamophile ou un haltérophile.  Les demandes du sport d’équipe sont très différentes.  Il faut prendre en considération le développement des qualités musculaires, des filières énergétiques, des qualités psychologiques et des aspects technico-tactiques dans le développement global de l’athlète en sport collectif ou autre (tennis en simple par exemple), tandis que l’on peut éliminer théoriquement le travail au niveau des filières énergétiques et de l’aspect technico-tactique chez les adeptes de dynamophilie et d’haltérophilie. 
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Il est donc important d’établir des priorités.  Au risque de me répéter, la force maximale et la puissance musculaire sont deux composantes essentielles de la préparation sportive.  En utilisant des méthodes issues de la dynamophilie, il est possible de travailler ces deux qualités musculaires en utilisant des mouvements plus basiques que comparativement à l’haltérophilie.  Pour travailler la force maximale, il convient alors de soulever des charges à un pourcentage élevé de son 1RM (85% et plus) et/ou d’employer diverses méthodes (voir article sur les moyens de développer la force maximale ici).  Pour travailler la puissance musculaire, on peut notamment utiliser les mêmes mouvements (i.e. squat, deadlift, bench press) avec des pourcentages de l’ordre de 30-70% du 1RM, mais avec la plus grande vitesse possible.  Dans ce cas-ci, le nombre de séries sera élevé, le nombre de répétitions faible et le temps de repos très court. 
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En ce qui a trait à l’haltérophilie, il faut d’abord s’assurer d’une maîtrise parfaite des deux exercices clés et de leurs variantes.  Une fois cela établit, on peut progressivement augmenter les charges soulevées, améliorant ainsi simultanément la force et la puissance musculaire d’un athlète, ainsi que la coordination, souplesse et flexibilité.  De plus, les mouvements d’haltérophilie enseignent l’utilisation de cette fameuse triple extension si recherchée dans les activités sportives (course, sauts, etc.), en plus de solliciter plusieurs groupes musculaires importants (chaîne postérieure, fléchisseurs des hanches, chaîne abdominale, articulation de l’épaule et stabilisateurs de l’épaule, entre autres).  Par conséquent, l’haltérophilie sollicite, de manière simultanée, une plus grande masse musculaire que pour les mouvements de dynamophilie. Si le sport pratiqué requiert la répétition de l’action sportive de manière répétitive, on visera alors un nombre de répétitions de l’épaulé-jeté et/ou arraché (+ variantes) allant de 3-5 répétitions.
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Maintenant, comparons les deux philosophies plus en détail sur le plan pratique.  Il est beaucoup plus accessible de pratiquer la dynamophilie que l’haltérophilie; cette dernière nécessitant de l’équipement spécialisé (barre olympique, plateforme d’haltérophilie et bumper plates), tandis qu’une barre, des poids et une cage à squat suffisent pour la dynamophilie. 
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Bien que les mouvements de l’arraché et de l’épaulé-jeté sollicitent d’importantes masses musculaires lors de leur réalisation, le seul moyen d’imposer un changement quant au stress imposé sur le corps est de manipuler les différentes variables de l’entraînement, c’est-à-dire changer le protocol d’entraînement.  Pour les mouvements de dynamophilie, il existe plusieurs variations de ces exercices.  Chacun sollicitant le corps d’une manière différente.  Par exemple, un front squat recrute davantage les muscles des quadriceps comparativement au back squat et le soulevé de terre sumo recrute davantage les muscles fessiers et les quadriceps comparativement au soulevé de terre traditionnel qui impose un stress optimale sur les ischios-jambiers et les érecteurs du rachis.  De plus, on peut modifier ces exercices afin de renforcir certains points faibles (bench press lock-out pour terminer le mouvement du bench press par exemple). 
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Lorsque vient le temps d’apprendre les mouvements, certains entraîneurs vous diront que l’enseignement de l’haltérophilie est long.  Selon Joe Kenn (ici), il suffit toutefois de savoir bien enseigner sa matière; savoir vulgariser l’exécution des exercices et parvenir à introduire une progression logique quant aux exercices sélectionnés.  Malgré tout, je crois qu’il est plus simple d’enseigner la bonne exécution des exercices de dynamophilie comparativement aux exercices d’haltérophilie.  Il est plus facile aussi de s’assurer d’une bonne posture et du maintien d’une bonne technique lors du squat, deadlift et bench press comparativement à des mouvements performés à plus haute vitesse.  Toutefois, lorsqu’un entraîneur est à l’aise à enseigner les mouvements olympiques, cela est beaucoup plus sécuritaire.
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En fin de compte, qui remporte la palme comme meilleure méthode en ce qui a trait à la préparation sportive.  Personnellement, je tends à utiliser davantage les mouvements associés à la dynamophilie.  Je trouve plus facile d’introduire différentes variations de ces exercices dans une progression logique de l’entraînement sur une période prolongée afin d’induire un niveau de stress différent sur l’organisme.  Toutefois, j’utilise les mouvements de l’épaulé et de l’arraché afin de travailler le travail en puissance musculaire et travailler la triple extension du complexe cheville-genou-hanche.  Je crois que les deux méthodes peuvent facilement être introduites dans un programme d’entraînement sollicitant les différentes qualités physiques.  Il s’agit seulement de sélectionner les exercices que l’on veut que l’athlète exécute en fonction de son évaluation initiale, du niveau d’expérience et des objectifs recherchés.  Comme on dit souvent, tous les chemins mènent à Rome (mais il faut savoir quel chemin emprunter!).

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