Visite chez Raymond Veillette au PEPS de l’Université Laval

Cela fait deux semaines que j’attendais avec impatience la journée d’hier.  La raison est fort simple, j’avais la chance, avec mon ami Simon Deschênes, d’aller discuter entraînement de haute performance avec Raymond Veillette à Québec.  Raymond est le préparateur physique de l’équipe de football du Rouge et Or de l’Université Laval et s’occupe de la préparation de nombreux athlètes professionnels.  Les plus connus sont Mélanie Turgeon (ski alpin), Patrice Bergeron (Bruins de Boston), David Desharnais, (Canadiens de Montréal) et plusieurs anciens joueurs de football du Rouge et Or qui joue dans la Ligue Canadienne de Football.   J’ai eu la chance de voir Raymond présenter une fois à l’Université de Sherbrooke, en plus d’avoir des collègues qui l’ont côtoyé lors de leur séjour à Laval et je n’ai qu’entendu que de bonnes choses à son endroit, autant pour sa personnalité accessible et son savoir.  Bref, je suis entré en contact avec lui et nous avons «booké» la journée d’hier pour se rencontrer et partager notre passion.  Voici un résumé de cette superbe journée.

Raymond Veillette, préparateur physique

Départ de Montréal pour aller chercher Simon à 7h15.  Nous nous étions donné rendez-vous au Peps de l’Université Laval pour 10h.  La pluie abondante nous a quelque peu ralenti, mais nous sommes arrivés à Québec à 10h15.  Nous nous sommes donc rendus à la piste intérieure pour rejoindre Raymond.  Le groupe présent était composé de joueurs de hockey professionnels et ils ont réalisés de nombreux exercices de pliométrie combinés avec des accélérations sur une courte distance.  Pour cette séance, grâce à l’utilisation de haies basses, le but était de recréer le déséquilibre des arrêts brusques et changements de direction sur la glace.  Une observation intéressante était de regarder Mathieu Garon réaliser des exercices de pliométrie par lui-même, étant le seul gardien de but du groupe.  Ses déplacements étaient spécifiques à sa position.  Par exemple, celui-ci réalisait un saut de pliométrie latérale avant de se laisser tomber en position papillon pour ensuite se relever et poursuivre la séquence. On pouvait voir, à le regarder, que les exercices qu’il réalisait étaient à la fois exigeant sur le plan neuromusculaire ainsi que sur le plan cardiovasculaire.  Une composante de la préparation physique que Raymond appelle composante neurométabolique sur laquelle je reviendrai sous peu.  Par la suite, nous avons suivi Raymond et les joueurs de hockey jusqu’à la pente de la mort pour le «conditioning» final de leur séance d’entraînement.  Après 8 sprints et un retour actif en jogging, les gars étaient vidés, mais toujours disponible à serrer la main des jeunes enfants.  Quand tu entends les jeunes dire «J’ai touché à Patrice Bergeron!», tu ne peux que rire et sourire.

Par les prochaines 4 heures, nous avons absorbé les connaissances de Raymond en ce qui a trait à la préparation physique.  Nous avons discuté de plusieurs sujets pendant notre entretien.  Le plus simple pour faciliter la compréhension sera donc de les énumérer et de vous donner une brève description des concepts qu’il nous a présentés.  Allons-y!

» La pliométrie

– Selon Raymond, il est possible de catégoriser la pliométrie en 5 sous-groupes afin de pouvoir bien l’adapter aux sports à entraîner , soit: la détente/explosion, la capacité à répéter des sauts, la capacité à répéter des lancers/frappes, la capacité à répéter des impulsions du bas du corps et la capacité à répéter des impulsions du haut du corps.

– Le concept d’entraînement neurométabolique est la combinaison de l’entraînement intermittent et des sauts de pliométrie.  L’entraînement intermittent aura donc un impact sur le système cardiovasculaire, tandis que l’athlète sera en mesure de développer sa réactivité de moyenne et/ou haute intensité grâce à la pliométrie et de pouvoir maintenir celle-ci sur une plus longue durée.

» L’haltérophilie

– Grâce à l’application Swing Reader disponible sur iTunes, Raymond est capable de démontrer immédiatement suite à l’exécution d’un mouvement d’haltérophilie la trajectoire de la barre.  Un outil intéressant!

– À quel pourcentage doit-on travailler la puissance musculaire?  50% de son 1RM?  Pour atteindre la puissance maximale, un travail avec 70% de son 1RM est indiqué par Raymond.  Le fait de monter même à 80 et 90% de son 1RM procure aussi des résultats similaires.

– Il est bénéfique de combiner l’entraînement de l’haltérophilie (puissance) et la pliométrie (vitesse), car cette combinaison permet de modifier la courbe force-vitesse.  Le tout est d’autant plus optimale si la force maximale est ensuite entraînée.

– De plus, il a été démontré que l’exécution d’exercices comme l’épaulé du sol ou power clean correspond à soulever environ 60% de son 1RM au soulevé de terre.  Cela peut équivaloir aux dires de Mike Boyle qui soutient que si tu peux soulever une charge x pour 3 répétitions au front squat, tu devrais être en mesure de lever cette même charge à l’épaulé en suspension (hang clean).

» Entraînement intermittent court

– L’entraînement de type intermittent court est l’entraînement de course privilgié par Raymond afin de développer la puissance aérobie maximale et la capacité à répéter des sprints.   Les efforts répétés sur 10,15, 20 et 30 secondes avec un ratio effort/repos de 1:1 réalisés à 110-130% de sa vitesse aérobie maximale developpe la PAM et reproduisent les efforts que l’on retrouve majoritairement dans les sports collectifs comme le football, le hockey et le soccer sans l’accumulation excessive de lactate.

» Dopage

– On sait bien que le Rouge et Or fut le cas de deux cas positifs à des substances interdites.  Toutefois, selon les dires de Raymond, les deux athlètes fautifs n’étaient pas les meilleurs dans la salle de musculation.  Il cite ensuite la Dre Christiane Ayotte, qui soutient que la prise de suppléments alimentaires et cette recherche de l’élément magique engendre des comportements dopants, ce qui peut mener ultimement à la prise de produits illégaux.

– Selon lui, on ne peut s’assurer de la garantie de sécurité sur certains produits ergogènes.  Il croit qu’il peut y exister des commandes de produits qui sont contaminés, même si la compagnie indique le contraire, car la vérification d’authenticité du contenu des produits ne s’applique pas sur tous lots produits.

» Périodisation de l’entraînement

– Raymond ne perd pas son temps avec la préparation physique générale en suivant une périodisation plus traditionnelle qui suggère de développer l’hypertrophie, la force maximale et finalement la puissance.  La réalité des sports collectifs fait en sorte que l’entre-saison est trop court et on ne peut pas perdre notre temps à suivre ce modèle.

– Il opte plutôt pour une «block periodization».  Dans son bloc d’entraînement, il mettra l’accent sur le développement d’une qualité physique et/ou une filière énergétique à développer.  Les autres recevront un stimuli adéquat permettant leur maintien.  Raymond progresse donc d’une préparation spécifique~générale vers une préparation spécifique~spécifique

Finalement, lors de notre visite des installations du PEPS (nous avons visité le bureau des entraîneurs de football ainsi que la salle de musculation pour la population générale), j’en ai profité pour jaser quelque peu du côté business de la préparation physique.  Il soutient que le domaine de la kinésiologie au Québec est en expansion certes, mais qu’il y a peu d’emplois dans le domaine de la préparation physique à la performance.  La part de marché pour chaque diplômé diminue donc à chaque année.  Lors de ses débuts, il a parti une firme de consultation avec des partenaires et ils ont éprouvé toutes sortes de difficultés à boucler leur budget à la fin de chaque mois.  C’est vraiment le poste de préparateur physique à temps plein à l’Université Laval, combiné à des charges de cours, qui lui a permis de s’établir comme une référence dans le domaine.  Nous avons parlé des gyms privés, une business souvent à risque et de l’échec de certaines franchises à vouloir s’établir au Québec.  Il déplore le fait que les parents déboursent des centaines voire des milliers de dollars pour des camps spécialisés d’une semaine et soient si réticents à envoyer leurs enfants suivre un plan d’entraînement de 12 semaines qui les aidera à performer à un plus haut niveau.

Bref, cette journée fût des plus instructives.  J’aime toujours saisir l’occasion de développer mes connaissances en entraînement et, bien que la lecture soit un devoir pour ma part, je crois que l’expérience que l’on retire d’une journée comme celle-ci est tout aussi importante.  Ces personnes partagent leurs expériences et leur vécu en entraînement avec nous et en revanche, la préparateur physique qui débute dans le domaine en sort grandit.  Comme le dit si bien Stéphane Dubé, ancien préparateur du Canadien de Montréal et des Penguins de Pittsburgh avec qui je travaille: « tu vas voir, c’est une discussion de 3 crédits que tu vas avoir avec Raymond!»  Je dirais même 6, surtout quand tu repars avec un cahier de notes de cours!

 

3 réflexions au sujet de “Visite chez Raymond Veillette au PEPS de l’Université Laval”

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